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Compte-rendu: Exploring Acquisitions Oxford 2009
Conférence organisée par Blackwell's à Oxford les 15-17 avril 2009.
VC et TG y étaient. Le site web officiel n'existe plus :( Liste des participants
Notes de TG en style télégraphique
Matthew Fraser
INSEAD, co-auteur de Throwing Sheep in the Boardroom (un livre sur le web 2.0)
Selon The Economist en 2006, le Web 2.0 est une révolution pour les médias de la même envergure que la presse de Gutenberg.
What is driving web 2.0 ?
- Velocity of technological changes
- Il a fallu 5 ans pour que Facebook passe de 0 à 150 millions d'usagers (et 7 ans à l'iPod). En comparaison, il a fallu 85 ans pour que le téléphone arrive à ce même nombre d'usagers [source?]
- Demographic e-ruption
- cf digital immigrants vs digital natives
- Horizontal vs. Vertical dynamics
- cf top-down ou echo chamber vs networked
--> donc une bibliothèque 2.0 doit intégrer ces valeurs-là.
Parallèle avec l'industrie de la musique: iTunes et iPod ont totalement changé le marché en 4 ans.
Le modèle de publication actuel est dépassé, comme pour la musique. Si on regarde la répartition du prix d'un livre, 10% va au créateur du contenu (très peu, comme pour la musique), 20% à l'agent, 20% à l'éditeur et 50% aux distributeurs. Les pop stars vendent désormais leur propre travail (ex Radiohead), est-ce que les auteurs de bestsellers vont aussi s'y mettre? Les livres sont désormais tellement bon marché et facile à obtenir sur amazon que le facteur économique ne suffit plus à justifier l'existence d'une bibliothèque. Valeur ajoutée: librarian = original search engine.
Alice Keller: The Perfect Library
Bodleian Library, Oxford | Texte de sa présentation (en allemand)
Sorte d'évolution historique de l'idéal des bibliothèques: (dans l'ordre chronologique)
- Bibliothèque d'Alexandrie et Pierre Boulée : la bibliothèque parfaite doit contenir tout le savoir (dans une seule salle)
- NY public library (cf illustration de couverture du Scientific American de mai 1911) : la bibliothèque ne peut pas tout contenir mais doit posséder un fonds suffisant pour lui permettre de répondre à n'importe quelle question. De plus, il n'est pas indispensable que tout soit immédiatement accessible au public -> magasins souterrains, système de commande.
- Paul Otlet : L'important n'est pas de réunir les livres mais d'en simplifier l'accès (discoverability) via une base de donnée bibliographique.
- ...
- Jorge Luis Borges : imagine la bibliothèque des livres pas encore écrits...
Référence intéressante: Robert Darnton, Google and the Future of Books, New York Review of Books 56(2), 2009
Rick Lugg: Expert Selection & Monographs Use, a brief history
R2 Consulting | Slides
Evoque l'évolution de la sélection dans les bibliothèques et les moyens de "mesurer" la pertinence de cette sélection.
Fait référence à la Kent Study [1] qui a étudié 40'000 ouvrages achetés dans une bibliothèque. Si on utilise le critère qu'un livre n'a été utile que s'il a été emprunté au minimum 3 fois, 60% du contenu de cette bibliothèque a été acheté en vain. Donc l'efficacité de la sélection par des experts (utilisée pour choisir ces ouvrages) n'est que de 40%.
Entre 1975 et 1995, le paysage a évolué, avec l'ILL, le partage d'info, la culture de Collection Management, les Approval Plans, etc.
Entre 1996 et 2006, les nouveautés ont été le workflow de sélection électronique, les consortial holdings, les collection analysis software... tout ça a mené à un développement des collections "compétitif"
Depuis 2006: moins de temps est dévolu à la sélection, RIC model [?]
Mais ça ne marche toujours pas mieux: taux d'efficacité est de 29% selon sa propre étude [réf?]. Pour faire mieux, faut-il laisser les usagers choisirs eux-mêmes? Problème de visibilité?
"Books are for use" -> les livres non utilisés sont-ils inutiles? Problème, les usagers ne savent pas tout. Utiliser ILL pour sélectionner les livres -> 2 études ont montré que ça marche bien [3].
Exemple de PDA: l'université du Vermont et son service Get This Book: les métadonnées sont importées via Google Books et le formulaire de proposition d'achat est ainsi pré-remplie. Le catalogue est donc évidemment enrichi avec des métadonnées correspondant à des livres qu'ils n'ont pas [OCLC?].
Recommandations:
- Vu que le système classique montre qu'un livre sur deux n'est pas utilisé, il faut allouer 50% des ressources au PDA
- Réduire l'effort à la sélection au titre par titre
- Utiliser les compétences des bibliothécaires pour améliorer le discovery, et non pour la sélection (ex: préparer des ressources doc pour un cours).
Références:
- Kent, Allen. Use of Library Materials:The University of Pittsburgh Study. Books in library and information science, v. 26. New York: M. Dekker, 1979
- Foster, Nancy F. and Gibbons, Susan (ed.). Studying Students: The Undergraduate Research Project at the University of Rochester, Association of College and Research Libraries, Chicago, 2007
- Suzanne M. Ward, Tanner Wray and Karl E. Debus-Lopez, “Collection Development Based on Patron Requests: Collaboration between Interlibrary Loan & Acquisitions”, Library Collections, Acquisitions and Technical Services 27 (2003): 203-213
Hazel Woodward: Report on the JISC National E-Textbook Debate
JISC | Rapports sur le projet ebooks du JISC
JISC = consortium national UK + responsable pour l'infrastructure IT des universités anglaises, groupes de projet et recherche en info doc.
Projet e-Textbooks: budget de 600'000 GBP pour acheter 36 manuels au format électronique (avec DRM), accessibles dans 167 universités, soit 2 millions d'étudiants. Coût: 0.25 GBP par étudiant. L'idée est de faire un test pour évaluer l'usage de ces manuels au format électronique et de mesurer l'éventuel impact sur les ventes de manuels (grande raison invoquée par les éditeurs pour ne pas faire d'e-textbooks). Ils ont donc fait un deep-log analysis des logs d'accès, et étudié en même temps les stats de prêt des universités concernées et les ventes de manuels.
A l'heure actuelle [2009], tous les résultats ne sont pas encore disponibles, mais les lignes suivantes se dégagent:
- L'usage des e-textbooks n'est pas répartié de façon équilibrée au fil de l'année (peaks), ce qui n'est pas du tout pris en compte par les solutions avec DRM (nombre d'accès simultanés, etc.)
- 31% des accès ont été fait depuis un ordinateur hors campus (home study).
- La majorité des usagers a accédé au contenu un paragraphe à la fois, env 10% a lu tout un chapitre et 10% tout le livre en une fois [!].
- 85% des usagers passent moins d'une minute par page
- La version électronique répond donc bien au besoin "just in time". Pour lire le manuel en entier, la version papier est préférée.
- Si le e-textbook est signalé dans l'OPAC, il est plus utilisé. S'il est signalé sur une plateforme comme Moodle aussi.
- La version électronique est donc complémentaire à la version papier, pour combler le peak demand, equity of access, off-campus access.
- Pas d'impact négatif mesurable sur les ventes de manuels
- Ils n'ont pas de chiffres sur la quantité de contenu qui a été imprimé vs lu à l'écran.
Débat sur le livre électronique: Warren Holder (UofT library), EBL et OUP
Q1: Pourquoi le livre électronique paraît-il toujours après la version imprimée
- EBL: problème de licence. Les éditeurs n'ont pas toujours les droits de diffusion électronique. De plus, ils pratiquent un embargo pour garantir les ventes de papier.
- OUP: Ne met pas d'embargo, mais il y a un délai pendant qu'ils retravaillent la version électronique.
- WH ne voit aucune raison de défendre l'embargo.
Q2: Qu'est-ce qui s'oppose à ce que les manuels soient diffusés en version électronique?
- OUP: il manque un market model pour que ça marche. On espère en apprendre beaucoup du projet du JISC. Evidemment, les éditeurs ont peur de perdre le marché du papier. OUP propose déjà certains manuels en version électronique, mais uniquement aux particuliers via ebooks.com.
- WH: On sait que ces titres rapportent beaucoup aux éditeurs. Les bibliothèques sont donc prêtes à payer plus cher pour les e-textbooks que pour les e-books classiques. Mais pour être juste, ce prix devrait être en adéquation à une éventuelle diminution des ventes du papier, ce qui reste à prouver.
- EBL: les éditeurs risquent d'en souffrir parce qu'ils n'ont pas de vraie stratégie digitale (et ils feraient mieux de s'y mettre rapidement).
Q3: Pourquoi 100% des monographies ne sont pas disponibles au format électronique?
- WH: Il est possible d'arriver à une telle couverture: si les éditeurs ne le font pas, Google le fera.
- EBL: Certains éditeurs n'arrivent pas à suivre car trop petits.
- WH: mais c'est justement là qu'un aggrégateur comme EBL devrait intervenir et offrir ces prestations aux petits éditeurs...
- OUP: Nous n'avons pas toujours les droits de diffuser la version électronique! Le copyright est toujours chez l'auteur. Avant de faire plus d'efforts pour clarfier ces droits, nous voulons être sûrs que ça rapporte assez.
- WH: pourtant, les éditeurs font des rentrées confortables sur les backfiles, ils pourraient prendre un risque.
- Salle: mais la situation est différente, car dans le cas des articles de journaux, le copyright appartient au journal. De plus, pour les monographies, se pose le problème des illustrations, dont les droits de diffusion sont différents, etc.
- OUP: si nous n'obtenons pas les droits de diffuser une image dans un e-book, nous la remplaçons ou nous l'enlevons.
- Salle: et si ces considérations étaient clarifiées en même temps que les droits pour le print? Voire e-only directement?
- OUP: ça couteraît beaucoup plus cher en royalties
Q4: Quand pourrons-nous acheter des ebooks au chapitre?
- EBL: ça existe déjà avec notre produit ePacks (electronic course reserve). Mais à cause du copyright, à nouveau, nous sommes obligés de proposer les chapitres sélectionnés séparément et ne pouvons pas proposer de documents aggrégés.
- OUP: y a-t-il vraiment une demande?
- WH: des profs fond déjà une sélection par chapitre depuis belle lurette, nous encourageons du reste les facultés à le faire car c'est de ça dont les étudiants ont besoin.
- OUP: du coup, il faut qu'on propose une façon officielle de le faire pour éviter le piratage...
- Salle: bien sûr qu'il y a une demande, les usagers accèdent déjà aux livres par chapitre (ne font qu'une photocopie d'un chapitre par exemple). Quant à la question de savoir si ça va marcher, faites-nous des offres et vous verrez...
Q5: Quelles sont les craintes de piratage?
- OUP: le piratage n'est pas une barrière, mais c'est une crainte. On se bat (en fermant les sites pirates) pour conserver nos droits. Mais on n'a pas remarqué une chute des ventes depuis qu'il y a des livres piratés...
- EBL: le piratage est inévitable, parce qu'il correspond à la manière dont les usagers veulent utiliser le contenu. Et si on ne voit pas les ventes baisser, c'est parce que les bibliothèques achètent beaucoup et qu'elles respectent le copyright.
- WH: mais où est le problème? Personne ne gagne de l'argent avec des ebooks piratés, je n'ai jamais vu de marché noir d'ebooks. Il est urgent que les éditeurs trouvent une solution qui ménage leurs droits tout en garantissant les mêmes libertés d'usage que les PDFs piratés, car le système actuel ne le permet pas. Si un prof demande à ses étudiants de lire un chapitre, celui-ci sera inévitablement photocopié, scanné, partagé, car c'est la seule façon de répondre à la demande ponctuelle.
- Salle (un éditeur): Non seulement il n'y a pas d'effet négatif sur nos ventes, mais nous profitons même du marketting viral.
- Salle: pouvons-nous imaginer la naissance de manuels e-only?
- OUP: on va déjà dans ce sens avec l'offre des ePacks de EBL, on voudrait ainsi éviter que les profs ne soient tentés de scanner un chapitre pour leurs étudiants. On serait prêt à vendre des chapitres (pour des ePacks) moins cher que le livre complet, mais on veut avoir la certitude que ces chapitres ne seront pas utilisés le semestre suivant (il faudra racheter).
- Salle: c'est contraire à ce que veulent les profs et étudiants!
Q6: Et le Patron-driven Acquisition?
- WH: C'est ce qu'on veut. Si seulement c'était possible pour 100% des titres...
- EBL: on offre cette possibilité depuis longtemps, la demande vient petit à petit. Ca aide les bibliothèques mais ça donne aussi un feedback aux éditeurs sur les titres les plus populaires. EBL essaie de vendre cette option aux éditeurs en leur disant que cela remplace l'ILL, sauf qu'avec le PDA, cela profite aux éditeurs tandis que les livres qui circulent via ILL ne leur rapportent rien.
Discussion TG et WH pendant la pause: UofT fait du PDA. Lorsqu'ils achètent un ebook via un aggrégateur (plus facile dans le workflow pour le PDA), ils essaient d'obtenir aussi l'accès via la plateforme d'éditeur. Budget 2 millions de CAD par an pour ça.
Rick Anderson
University of Utah
Un publishing model n'est pas un pricing model et ce n'est pas un format.
Modèles de vente actuels:
- Unitary chunk (ex database, book, ebook collection at a fixed price) : it doesn't change over time
- Pile on (ex. journal subscription) : annual fee, rising with the inflation
- Churning content (ex EBSCO Academic Search Premiere, on peut swapper les titres) : annual fee, rising with the inflation
- Teenager : rise in content and in price
- Big Deal : promesse de paiement, fixed price cap
Modèles d'achat:
- One-time purchase -> modèle de vente 1
- Accrual -> modèle de vente 2 (approval plans, subsciptions)
- Spinning plates -> modèle de vente 3 (la bibliothèque suit les changements en continu)
- Big gulp -> modèle 5
- Ladylike sip -> modèle 2 (article-level purchasing)
Problème: les budgets diminuent (-19% en 2009 pour l'université de l'Utah)
Donc, la notion de collection est obsolète! On n'a besoin que d'une poignée de bibliothèques qui ont "tout", pour toutes les autres, il faut se concentrer sur l'accès. Y compris pour les articles, un abonnement à un journal = un approval plan pour les articles, et ce n'est pas un compliment.
Solution: il faut développer le PDA pour les ebooks et les articles. Et il faut le faire de façon transparente (les lecteurs doivent recevoir le contenu de la même façon et à la même vitesse, qu'il ait été acheté préalablement ou à la demande). La sérendipité survivra très bien au monde virtuel, cf. recommandations d'Amazon et Google Books. Si le lecteur souhaite un support imprimé, il faut faire du print on demand. Par exemple, il demande un print on demand, on peut soit le lui facturer 10$ et il garde le livre, soit il le rend à la biblio, qui l'incorpore (pas besoin de l'imprimer la prochaine fois).
Vision de l'édition dans le futur:
- fast delivery of print - immediate ebook access
- print on demand - flexible sales model
- banish the term "out of print" - fix the backoffice
Salle (université du Vermont): très bien, mais le print on demand ne doit pas être géré par la bibliothèque, laissez les usagers le faire.
Débat entre Paul Courant et Jean-Claude Guédon sur le projet Google Books
Paul Courant est pour:
la digitalisation de masse faite par Google n'aurait jamais été possible en procédant "proprement" (clarifier au préalable les droits, etc.). Concernant les craintes que Google se retrouve seul propriétaire du contenu scanné, c'est faux car Google fournit aux bibliothèques participantes une copie des ouvrages scannés dans leurs collections. La conservation de cette copie est confiée aux bibliothèques, qui peuvent la verser dans une archive sécurisée répondant aux normes de préservation à long terme, elle survivra à une éventuelle fermeture du service de Google, peut être partagée, etc. Le settlement actuellement en discussion propose de résoudre financièrement les problèmes de droits, notamment celui des "orphaned works". Dans ce dernier cas, il est très dommage que seuls les ayants droit reçoivent une contribution financière pour ces titres qu'eux-mêmes n'ont pas réussi à préserver tandis que les bibliothèques, qui ont permis cette préservation, ne reçoivent rien.
Jean-Claude Guédon est contre:
Dans les faits, Google Book Search doit être considéré comme un "appareil" (device) de lecture: même téléchargé sur un ordinateur pour une lecture offline, un ebook provenant de GBS ne peut pas être recherché, cela force l'usager à utiliser Google. Google offre un "accès", mais ils dictent les conditions. Et Google contrôle le contenu de son service, on doit leur faire confiance. Quant au settlement, il trouve que c'est une très mauvaise solution, car une décision politique (accès au savoir, droit d'auteur, etc.) est rendue par une cour de justice. Ce genre de prise de position devrait plutôt être faite par les gouvernements.
Résumé
Le trend le plus visible est que les intermédiaires disparaissent de plus en plus entre les producteurs de contenu et les utilisateurs. Les acteurs restants ressemblent à des supermarchés, ils mettent le produit en avant et peuvent influencer les choix des consommateurs de manière indirecte (behind de scenes) = rôle des bibliothèques dans le futur?
The book is not dead, it's just going undercover.
Conclusion TG: le PDA électronique semble la meilleure voie à suivre. Augmenter la visibilité du contenu, développer le plugin Firefox pour qu'il marche sur Google Books, et pour qu'il propose directement un achat papier ou élec si le livre n'est pas dispo.